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Souffle et insomnies

Nous enseignons 5 clés respiratoires pour aider l’endormissement, outre les solutions annexes bien connues des naturopathes, telles que l’allégement du repas du soir, l’aération de la chambre, l’orientation du lit, l’éviction des nuisances électromagnétiques dans la chambre, le bain tiède (38-39°), la bouillotte chaude sur le plexus solaire, le pédiluve bien chaud (40-42°), la ritualisation du coucher, les plantes et les huiles essentielles…

 

  1. La respiration triangulaire pointe en haut.

Associée uniquement à la zone abdominale (respiration ventrale ou diaphragmatique simple), cette pratique imite le rythme naturel du souffle du dormeur. Elle mobilise comme un effet miroir pour les neurones cérébraux concernés et pour le psychisme fait office de leurre, conduisant rapidement à un état vagotonique propice à l’endormissement.

Le rythme est assez libre,  mais naturel, pas trop rapide, par exemple sur 3’’ / 6’’ / 2’’. Ajuster selon le ressenti et les bénéfices qui doivent être assez rapides.

Ne pas pratiquer dans un esprit de « lutte contre l’insomnie » ou « d’obstination à s’endormir » car cette tension mentale s’opposerait aux bienfaits de la respiration. N’oublions pas que s’endormir, c’est oser s’abandonne au non faire, c’est lâcher prise du côté de la conscience de veille, donc tout le contraire de la vigilance ou de la crispation mentale… !

  1. La respiration circulaire (tranquille) qui ventile doucement

Pratiquée également sur le mode ventral, cette respiration circulaire n’est pas ici comparable à une hyperventilation sportive ou psychothérapeutique (type Rebirth). Elle procure toutefois une forme d’ivresse très douce qui favorise rapidement l’abandon aux bras de Morphée.

Son rythme est important, ne descendant pas en dessous de 5’’ / 5’’ (soit précisément le rythme de la respiration associée à la « cohérence cardiaque ». Plus rapide, l’exercice pourrait, chez certaines personnes sensibles, mobiliser quelques émotions indésirables, voire une expérience anxiogène. Tout le contraire de ce que l’on cherche ici !

Bien pratiquée, cette respiration circulaire mène au sommeil en  moins de 2 à 3 minutes.

 

  1. Les séries de soupirs

Contre-indications relatives pour cette pratique : apnées du sommeil, dépressions non stabilisées, thanatophobies[1].

Ce training est probablement le plus efficace des 4 options proposées ici. Il imite au plus juste la respiration d’une personne en plein sommeil lent profond. Toutefois, son efficacité est quelque peu proportionnelle à la subtilité de sa pratique : il s’agit en effet de libérer un temps de « pause respiratoire » et non pas « d’apnée retenue » entre deux soupirs. La chose semble aisée à première réflexion, mais s’avère paradoxalement difficile au novice. En effet, le « non faire » demandé ici d’oppose tout à fait à la notion d’exercice respiratoire (comme développé dans le chapitre de la « respiration soupire »).

Lieu du souffle : on débutera par quelques inspirations très profondes, complètes (thoracique et ventrale donc).

Rapidement, la fatigue aidant, on verra que le souffle s’installe vite en ventral uniquement (lever le sternum et écarter les côtés demande bien plus d’efforts que de simplement gonfler l’abdomen !).

Rythme conseillé : au début, on tâtonne un peu comme pour toute exploration nouvelle, mais on peut débuter facilement par 4’’ pour l’inspiration / 2’’ pour une courte rétention pleine / 2’’ à 3’’ semblant le temps nécessaire pour un simple et spontané soupire ensuite. Vient alors une pause naturelle, non contrôlée, sans aucun blocage (nous insistons volontairement sur ces mots)… qui dure un certain temps. Ce temps de pause, de non agir, où l’on ne bloque rien mais où l’on ne provoque rien non plus, durera selon les personnes de 2’’ à 5, 7, 9’’ et parfois bien plus.

On peut compter ses soupirs intérieurement, ce qui demande un minimum de concentration et va permettre un décrochage spontané de la conscience au bout de quelques soupirs. De fait, la personne glissera rapidement dans le sommeil sans même se rendre compte de quoi que ce soit. Un peu comme une sympathique et douce anesthésie…

Il est très souhaitable de greffer quelques pensées sur l’exercice, comme :

Phase 1) « J’inspire tranquillement et j’en suis conscient

Phase 2) je retiens mon souffle deux secondes

3) je lâche, je lâche tout dans mon soupir… je m’abandonne, en confiance, dans mon soupir… confiance…

4) j’attends… je goûte une pause respiratoire… tout va bien… confiance… j’attends le nouvel inspire… je l’accueille…

Reprise en 1), etc.

Il est bien rare que l’on résiste à plus d’une vingtaine de cycles…

Cette technique peut être utilisée aussi très avantageusement en cas de sommeil coupé dans la nuit.

 

  1. So-Ham…

Cette méthode est utilisée en Inde par beaucoup de pratiquants du Yoga, et suppose une certaine habitude des mantram (mots ou courtes phrases rituelles et sacrées) que l’on répète ou psalmodie souvent (pratique du Japa).

Elle consiste à penser le phonème « So-oooooo » sur l’inspiration et à murmurer presque silencieusement (Ham-mmmmm » sur l’expiration. Le rythme est celui de la respiration circulaire vue plus haut (N°2). Le sens profond du mantram So-Ham reste difficile à traduire exactement en français, mais se rapproche de « Je suis Lui », « Je suis Cela », « je suis Un avec Celui qui Est ». Il évoque donc une étape du chemin du yogi en marche vers la réunification au Tout, la fusion à l’Essence de l’Etre (à l’Absolu, à Dieu…).

Pratiqué dans un esprit de dévotion, il génère un état de confiance totale, d’abandon aux bras de la Mère universelle, ce qui bien évidemment rapproche du sommeil serein, paisible, en sécurité…

On retrouvera cette approche spirituelle du soupir, plus développée encore, dans la respiration carrée du chapitre « Dieu au cœur de mon souffle ».

 

  1. La méthode « 4-7-8 » du Dr. Andrew Weil[2]

Notre sympathique confrère américain a développé et médiatisé une respiration rythmée inspirée de pratiques ayurvédiques, et il l’a simplement nommée « techniques 4-7-8 ».

Il s’agit d’une respiration triangulaire pointe en bas, et, assez paradoxalement, elle aide considérablement à se relaxer, trouver le calme et s’endormir rapidement.

L’exercice peut se pratiquer debout, assis ou couché.

  1. Commencer par expirer à fond, puis fermer les yeux et placer la pointe de la langue en contact avec l’arrière des dents du haut, ce qui favorise la circulation de l’énergie le long des deux grands méridiens antérieur et postérieur qui se rejoignent au niveau des lèvres (le Vaisseau Conception et le Vaisseau Gouverneur). Ce contact se fait sans aucune crispation ou tension de la bouche, des lèvres ou de la langue, mais en toute simplicité. La langue se trouve en fait dans la bonne position bien souvent dans la journée et sans faire aucun exercice. Selon les médecines énergétiques indienne, chinoise ou tibétaine, c’est la façon automatique et naturelle d’assurer la bonne circulation du Qi, du Prâna, du Yin et du Yang…
  2. Ces préambules posés, commencer par inspirer par le nez sur 4 temps.
  3. Retenir ensuite sur 7 temps, tranquillement.
  4. Enfin, ouvrir la bouche en forme de « O », lèvres en avant, et expirer à fond sur 8 temps en laissant cette expiration faire du bruit au passage de l’air.
  5. Continuer en reprenant au point N°2 et continuer l’exercice une à deux, voire trois minutes.

 

Selon Andrew Weil, la méthode est puissante et rapidement efficace en cas d’anxiété, de crises paniques (spasmophilie, tétanie), crises d’angoisse,  et troubles du sommeil.

Pratiquée au réveil, elle participe à la mise en forme.

Pratiquée avant la méditation, elle en favorise l’intégration paisible et apaise le mental.

Pratiquée au couché, elle peut répondre à nombre d’insomnies dès la première minute parfois !

 

Au début des pratiques, on comptera assez vite (plus vite que des secondes effectives) , puis, de semaine en semaine, on s’installera dans un triangle ou les secondes sont réellement prises en compte.

 

Le protocole n’est pas sans rappeler celui de « la cohérence cardiaque », mais son rythme est radicalement différent.

Il est conseillé de pratiquer au moins matin et soir sur quelques semaines pour profiter pleinement des bienfaits de l’exercice. Comme tous les trainings ou toutes les Sadhana[3], c’est la répétition qui demeure porteur de fruits.

Aucune contre-indication tant que l’exercice ne force pas sur les inspirations et que le rythme est confortable. On trouve sur le Net beaucoup de témoignages affirmant avoir solutionné des soucis de sommeil grâce à la méthode. Pour notre part, nous pouvons confirmer, précisant que ce n’est pas la seule clé respiratoire possible et que les lecteurs pourront expérimenter puis choisir parmi les 5 techniques présentées ici.

 

Andrew Weil reste humble quant au développement d’explications sophistiquées, préférant constater les bienfaits de l’exercice et respecter ses sources védiques. Il propose toutefois la piste de l’oxygénation sanguine qui, selon lui, nourrit tout particulièrement le système parasympathique. L’idée est cohérente et assez satisfaisante. Nous lui ajouterons le fait que les expirations par la bouche, bruyantes et poussées à fond, sont du même ordre psychologique et énergétique que les soupirs conscients, donc synonymes de détente et bien-être profond, de lâcher-prise des tensions. Enfin, le symbolisme de l’automne respiratoire (expiration) décuple l’aspect « détox » de l’exercice et soutien l’abandon du négatif au plan émotionnel, mental et énergétique.

 

 

[1] Comme le temps de « l’hiver » respiratoire va être privilégié en cet exercice, on se souvient que cette saison du souffle peut être mal vécue chez les dépressifs, en cas de phobie de la mort, etc.

[2] Médecin naturopathe et écrivain américain né le 8 juin 1942 à Philadelphie. Diplômé de l’université Harvard en médecine et en botanique, il est l’auteur de plusieurs ouvrages. Il est un ardent défenseur de la médecine intégrative.

[3] Mot sanscrit : littéralement, une pratique, ce que l’on accompli en conscience ; ascèse joyeuse ou discipline corporelle et spirituelle.