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Les sources de l’acidose tissulaire toxique

Le professeur Ménétrier, grand médecin de terrain et père de la thérapie par les oligoéléments, affirmait : « en ultime réflexion, il n’y a chez l’homme qu’une seule et unique maladie : l’arthritisme [i]. » Or, c’est essentiellement de cela qu’il s’agit ici : l’arthritisme étant la lente dégradation d’un terrain face à une acidification multifactorielle de plus en plus difficile à neutraliser.

Un grand nombre d’acides, endogènes ou exogènes sont effectivement métabolisés à chaque instant au sein de nos cellules. Pour simplifier leurs sources alimentaires, ils peuvent être classés en différents groupes faciles à reconnaître dans son assiette comme dans son mode de vie.

Les acides alimentaires directs

Ils  possèdent un goût acide en bouche.

  • Les fruits acides: surtout les agrumes, mais aussi les ananas, kiwis, cerises aigres, pommes acides, abricots séchés, etc. (Et plus généralement toutes les baies et les fruits peu mûrs, sauf la banane.)
  • Les verdures acides : épinards, oseille, feuilles vertes des blettes, rhubarbe, cresson…
  • Les laitages acides: yaourts, caillé, koumis, kéfir, fromage blanc et autres fromages frais peu ou pas égouttés.
  • Les condiments acides: vinaigres, câpres, pickles, ketchup, sauce tomate, moutarde.
  • Les boissons acides: vin (surtout blanc), champagne, cidre, bière, sodas et cola.
  • Certains médicaments et additifs : aspirine et autres salicylés, vitamine C, acide acétique, lactique, malique, tartrique utilisés en pharmacie…

Notons que certains de ces aliments possèdent des quantités importantes de bases ou minéraux alcalins, ce qui peut les rendre alcalinisant si l’organisme du consommateur est capable de les métaboliser correctement. C’est par exemple le cas des produits laitiers (riches en ions calcium) et même du citron.

Les acides alimentaires indirects

Leur goût n’est pas acide, mais ils libèrent des acides lors de leur métabolisme digestif ou cellulaire.

  • Toutes les protéines concentrées (viandes, légumineuses, miso et sauce soja, Viandox® et autres concentrés de viande pour bouillons, levures alimentaires…). Elles produisent des acides forts comme l’acide chlorhydrique, l’acide sulfurique, l’acide phosphorique ou encore l’acide urique. Pendant la digestion, les acides aminés soufrés qui composent certaines protéines sont oxydés et relarguent des sulfates qui vont contribuer à l’acidification via la production d’acide sulfurique. Rappelons que l’acide urique peut être, chez les carnivores, 15 à 20 fois mieux éliminé car leurs reins libèrent une enzyme (l’uricase), ainsi que de l’uréase et de l’allantoïnase, que l’homme ne sécrète naturellement que très peu (2 %).
  • Tous les sucres (mais surtout raffinés, industriels et dont l’indice glycémique est élevé).
  • Les excitants libérateurs de méthyl-xanthines (ou bases xanthiques) : café, thé, cacao, guarana, maté… Jadis nommés « poisons overtoniens[ii] », du nom du savant suédois Overton. Ils sont solubles dans l’eau mais aussi dans les graisses ; leur pénétration tissulaire est donc potentiellement dangereuse, surtout pour le système nerveux. Leurs composés majeurs (familles de toxiques overtoniens) sont surtout la cocaïne, la morphine, la nicotine, l’alcool, la théobromine, l’éther et le chloroforme, mais on leur associe régulièrement les actifs des plantes toniques ou excitantes comme le café (caféine), le thé (théine), le cacao (théobromine), le maté ou Ilex paraguariensis (matéine ou plus exactement un complexe de caféine, théobromine et théophylline), ou le guarana (guaranine). Ici comme ailleurs, il s’agira de réviser sa consommation en termes de qualité et de quantité.

De plus…

  • Les produits remportant la palme d’or des purines (devenant acide urique) sont par ordre décroissant de toxicité : cacao, ris de veau, café et thé secs, anchois, sardines, harengs, truite, carpe, viande de bœuf, poulet, saumon, lapin, légumineuses, morue, pain complet, petits pois, pomme de terre, lait, œuf, laitue… On peut estimer qu’à partir du poulet les taux sont admissibles.
  • La palme concernant l’acide oxalique revient encore au cacao, puis, dans l’ordre, au thé sec, au poivre, à l’oseille, aux figues sèches, au chocolat, et plus modestement au concombre, à la carotte, la pomme de terre, aux haricots verts, etc. La frontière douteuse se situant entre le chocolat et le concombre… douloureux dilemme !!!
  • La richesse en acide des fruits est étonnante. Mal métabolisés, ils libèrent acide citrique, ascorbique, malique, tartrique, salicylique, phosphorique, sulfurique, formique, gallique, caproïque, quinique, acétique…
  • Une colère rentrée produit beaucoup d’acide lactique et pyruvique, et un peu d’acide butyrique. Une colère exprimée également, mais avec à la clé 100 fois moins de retombées pathogènes !
  • Le jus d’orange, consommé en croyant bien faire au petit-déjeuner, en hiver qui plus est, et chez des sujets nerveux prédisposés, est, selon les naturopathes, un facteur essentiel dans le développement de la spasmophilie depuis 50 ans dans notre société. Les chinois confirment aussi l’effet « glaçon » délétère de l’orange sous nos climats…
  • Des études médicales récentes tendent à inviter les malades souffrant de polyarthrite rhumatoïde à suivre un régime végétarien équilibré. Des conclusions équivalentes sont tirées, en relation avec beaucoup de cas de calculs rénaux [iii].
  • Les acides phosphoriques de nombreux médicaments, l’acide phytique du pain complet à la levure ordinaire – et non au levain – et l’acide oxalique de l’oseille ou du chocolat rendent le calcium organique quasi inassimilable.
  • Si les urines s’enrichissent en bases minérales lors d’une cure d’agrumes ou de fruits en général, ce n’est pas par excès de bases apportées par les fruits, mais bien par sacrifice alcalin de l’organisme contre les excès d’acides combinés des fruits.
  • Les lithiases urinaires sont un bel exemple de concrétisation de cristaux sur le terrain de l’acidose toxique. On y compte des urates, carbonates, phosphates, citrates, calcium, oxalates, et autres dépôts souvent spectaculaires indiquant la sclérose localisée de ces déchets.

Quant aux lipides, même libérateurs d’acides gras, ils sont considérés comme plutôt neutres ; par exemple l’acide linoléique de l’huile de lin ou de bourrache, C18H32O2.

S’ajoutent à ces sources des productions d’acides endogènes

Liées au stress

Soucis, conflits dans le couple, dans l’entreprise ou la société civile, surmenage physique ou intellectuel, tensions relationnelles répétées, harcèlement, mental anxieux, insécurité affective ou financière, émotions mal gérées… sont devenus le quotidien de beaucoup d’entre nous. Cette chronicité a remplacé les facteurs de stress aigu que connurent nos ancêtres, jadis confrontés aux prédateurs, aux séismes et aux guerres tribales incessantes. Il demeure que nos systèmes d’adaptation sont soumis à rude épreuve, participant à l’acidification du terrain d’une manière souvent insidieuse…

  • En bloquant le bon fonctionnement des émonctoires chargés d’éliminer les acides (reins, poumons et surtout peau). Le stress inhibe en effet une part de la diurèse, de la bonne ventilation pulmonaire et des fonctions cutanées (peau froide, blanche et fermée).
  • En altérant le sommeil et donc les temps naturels de désacidification nocturne.
  • En surconsommant des catalyseurs et des minéraux impliqués dans le métabolisme de neutralisation des acides, comme les vitamines du groupe B, le magnésium, le lithium, le rubidium, le zinc, le manganèse, le calcium ou le potassium.
  • En entretenant de nombreuses microcontractures ou spasmes musculaires inconscients (épaules levées, ventre tendu, mâchoires serrées, jambes qui s’agitent involontairement…) et saturant les muscles d’acide lactique (lactates). Cette acidose est aussi connue des bodybuildeurs qui voient leur taux de GH (hormone de croissance) s’élever significativement [iv].
  • Si 75 % des acides faibles sont éliminés par les voies respiratoires, puisque, à chaque expiration, on se libère des ions H+ incriminés, le stress inhibe l’amplitude optimale du diaphragme et donc du souffle libre .
  • Via un excès de cortisol, les sécrétions acides de l’estomac sont augmentées et la rétention hydrosodée provoque une stase (relative) du liquide interstitiel telle qu’on en rencontre dans les œdèmes : ces stases limitent considérablement le drainage des acides du milieu extracellulaire par les capillaires veineux et lymphatiques.
  • Indirectement, on sait aussi que le stress pousse à une surconsommation, voire à une addiction de produits acidifiants comme les sucres, sodas et autres acteurs de la malbouffe…
  • Il participe aussi à la démotivation vis-à-vis du sport ou des activités corporelles de loisir, elles-mêmes largement désacidifiantes

Liées aux fermentations du côlon droit

Il est connu que le bol fécal qui s’élabore dans le côlon droit est affecté par le métabolisme terminal des glucides et des fibres alimentaires. Ce processus est naturellement acide. Il peut générer des gaz (bruyants mais peu ou pas odorants : CO2, H2, et CH4). Les butyrates ou acides gras à courte chaîne sont libérés in situ et sont utiles comme carburant des cellules intestinales. Lorsque le processus de fermentation acide est dominant, comme chez les gros consommateurs de sucres, il n’est que mal compensé par les putréfactions du côlon gauche dont le pH est alcalin. Les bactéries intestinales génèrent des acides (surtout propionique, butyrique et acétique). Un paradoxe de taille a dans ce cadre été mis en évidence : la pomme de terre ou la carotte, pourtant alcalines, deviennent acidifiantes via ce processus de fermentation dans le colon droit [vi]. Les fermentations coliques libèrent les acides lactique, butyrique, propionique, acétique et succinique, presque complètement réabsorbés et ramenés au foie.

S’ensuivent des selles globalement plus acides, plus liquides et pouvant brûler l’anus à la défécation. Ce phénomène est propice au développement de candidoses (mycoses intestinales pouvant migrer vers les voies génitales par exemple) et de parasitoses. Il entretient une sournoise inflammation intestinale qui tend à migrer vers l’intestin grêle, la barrière iléo-cæcale étant devenue souvent béante…

Liées au surmenage musculaire

Il s’agit essentiellement de surproduction d’acide lactique. Les déchets dits métaboliques liés aux efforts musculaires sont composés de lactate et d’ammonium, et bloquent la production d’énergie et les systèmes d’élimination. Ces toxines portées au cerveau seront responsables de bien des malaises et de fatigue générale.

Liées à la sédentarité et à l’insuffisance respiratoire

Paradoxalement, si trop d’efforts acidifient dangereusement le terrain, la sédentarité fera de même sur un mode indirect, via le ralentissement du flux circulatoire et des éliminations acides par les poumons, les reins et surtout la peau.

Liées à l’insuffisance des émonctoires (foie, reins, peau, poumons)

Bien des pathologies associent leurs symptômes spécifiques à une insuffisance émonctorielle. Pour exemple : les cirrhoses, les hépatites virales, les insuffisances hépatiques fonctionnelles ou iatrogènes (liées à des médications), les insuffisances rénales fonctionnelles ou iatrogènes, les brûlures étendues, l’asthme, l’emphysème, la bronchite chronique et les autres insuffisances respiratoires chroniques…

Liées aux radicaux libres

Ces agresseurs métaboliques dont les atomes d’oxygène deviennent comme ivres de mariages moléculaires (jadis les Britanniques avaient caricaturé les radicaux libres en les nommant « molécules oxygénées en rut ») sont dans les pathologies de civilisation, les maladies auto-immunes, et dans tous les processus inflammatoires [vii]. Bien compris, le processus d’oxydation qu’ils entretiennent est corrélé à une acidification systémique.

Liées aux carences en catalyseurs des acides

À la fois cause et conséquence de l’acidose, on connaît les principaux acteurs : vitamines du groupe B (B1, B2, B3, B5 surtout), manganèse, magnésium, fer et soufre. On les retrouvera comme cofacteurs indispensables dans le complexe cycle de Krebs au plan intracellulaire.

Des manques de zinc ont été aussi notés : L’anhydrase carbonique, une métallo-enzyme importante du métabolisme acide-base a en effet besoin de zinc pour assurer sa fonction. Des études in vivo ont démontré que le déficit en zinc réduisait de manière significative l’activité de l’anhydrase carbonique des globules rouges (ou érythrocytaire [viii]).

Liées aux excès de sel de table ?

Le sel ou chlorure de sodium (Na Cl) appartient à la série des chlorures alcalins.

Il est connu qu’à trop forte dose, le sel contribue à augmenter la tension artérielle. Un apport de 2 g de sodium, soit 5 g de sel par jour, semblerait suffisant, mais la consommation est souvent très supérieure (9 à 10 g par jour en moyenne en 2001 en France). En 2011, elle est passée à 8,7 g/j chez les hommes et 6,7 g/j chez les femmes, sans prendre en compte les ajouts de sel de table et du sel de cuisson, soit de l’ordre de 10 g/j chez les hommes et 8 g/j chez les femmes au total (alors que l’OMS recommande une consommation maximale de sel de 5 g/j). La consommation moyenne est descendue à 7,7 g/j en 2017 suite aux recommandations répétées des médias et du corps médical [ix]. Dans la nature, et dans les organismes vivants aussi, les bases sont susceptibles de donner des sels quand elles sont neutralisées par un acide : C’est en particulier les cas du chlorure de sodium, Na Cl, qui compose essentiellement l’eau de mer. Ainsi,  est légèrement alcaline avec un pH d’environ 8,2.

Le sel, quant à lui est résolument neutre car ses ions sodium et chlorure sont des ions indifférents et équilibrés dans le solvant eau. Mais, on peut taxer le sel d’être indirectement lié à une acidose métabolique, car sa consommation élevée augmente l’élimination de calcium dans les urines, pouvant concourir à une perte minérale de type ostéopénie puis ostéoporose. Enfin, il augmente aussi le taux de HCl (acide chlorhydrique) de l’estomac, obligeant les bicarbonates alcalins à se sacrifier  pour neutraliser le bol alimentaire…

 

[i] Ménétrier Jacques, La médecine des fonctions, éditions Similia, 2000.

[ii] Lorenc Victor et Laboulais Jean, Les Poisons overtoniens, Maloine, 1930.

[iii] Kieffer Daniel, Le Procès de la viande et les alternatives, Jouvence, sortie prévue 2020.

[iv] In https://www.researchgate.net/publication/5665489_The_role_of_lactate_in_the_exercise-induced_human_growth_hormone_response_evidence_from_McArdle_disease

[v] L’acide carbonique est très volatil ; dans le poumon, il se décompose en CO2 et H2O.

CO2 + H2O = H2CO3 = H+ + HCO3. Or, le pH étant le cologarithme de la constante de dissociation de l’eau, en se dissociant, chaque molécule d’eau libère un ion H+ et un ion OH. Normalement, le nombre de molécules d’eau plasmatique dissociées est très faible de l’ordre de 40 nanomoles/l, ce qui, en notation cologarithmique correspond à 7,40 : 7,40 = colog 10 – 7,4 nmol/l. Toute augmentation de la dissociation de l’eau augmente la concentration en ions H+ donc diminue le pH : il en résulte une acidose. D’autre part, la PCO2 (pression en CO2) est conditionnée par le niveau de ventilation alvéolaire et donc la fonction respiratoire ; l’hypercapnie aiguë (PCO2 > 42 mmHg) est synonyme d’hypoventilation alvéolaire et entraîne une acidose respiratoire aiguë. (in http://medecine.ups-tlse.fr/dcem4/module11/urgence/219_Tbles_equil_acido-basique_desordres_electrolytiques.pdf )

[vi] Dr Bruno Donatini, intervention lors du Congrès des thérapies quantiques de Reims, le19/11/2012.

[vii] Sujet développé dans Kieffer Daniel, Comment se régénérer pour bien vieillir ?, Sully, 2017.

[viii] King J. C. et Cousis R. J., “Zinc”, In Shils M., Shike M., Ross C., Caballero B., Cousins R. (eds), Modern Nutrition in Health & Disease, Lippincott Williams & Wilkins, Baltimore, Philadelphia, 2006, pp. 271-285.

[ix] https://www.aquaportail.com/definition-5380-alcalin.html